Un crime médiatique contre l’Afrique
"Un crime médiatique contre l’Afrique"
Journaliste, essayiste spécialisé sur l’Afrique depuis 30 ans, Christian d’ALAYER publie des livres que tous trouvent géniaux… mais dont personne ne parle…
Ses thèmes : Notre structure sociale néocoloniale, notre racisme, notre aveuglement face à l’histoire, et surtout la nuisance de pseudo élites prédatrices Occidentales et Africaines...
Christian d’ALAYER s’attaque aux derniers grands tabous de notre société.
"Un crime médiatique contre l’Afrique" : pourquoi ce livre ?
C’est un coup de gueule contre mes contemporains, contre l’Occident. Le racisme et la méchanceté me minent. Je n’arrive pas à comprendre comment nous en sommes arrivés à être aussi laids, alors que je crois que l’homme n’est pas foncièrement mauvais. Donc, je pense qu’on peut changer. Depuis le début, nous sommes persuadés que nos valeurs sont les meilleures et nous n’écoutons personne. Nous ignorons de ce fait l’histoire de l’Afrique noire, nous ignorons tout de cette grande civilisation Bantoue, qui s’est étendue du Golf de Guinée au Zimbabwe, bien supérieure aux Sahéliens qui, eux, furent armés et formés par les Arabes et les Européens, pour traverser le Sahara et commettre les pires atrocités dans ces havres de cultures qu’étaient les Ashantis, les Yorubas... Une véritable civilisation humaniste, basée sur la famille, égalitaire, voire matriarcale, et très évoluée a dominé au sud du Sahara pendant des siècles.
Mais, dans notre aveuglement, nous l’ignorons à un point tel qu’on a fait de ces gens exceptionnels le chaînon manquant entre le singe et l’homme !
"Un crime médiatique"… Les médias sont-ils seuls en cause selon vous ?
Quand je dis les médias, il s’agit pour moi d’un ensemble d’intellectuels. Occidentaux d’abord, qui, soit ne s’intéressent pas à l’Afrique, soit s’y intéressent très mal : la vision est rapide et raciste. Les intellectuels Africains expatriés formés par les occidentaux sont aussi en cause. Ces gens sont totalement inutiles, corrompus et servent de caution à des stéréotypes qu’ils répandent volontiers auprès de nos intellectuels pour leur propres intérêts.
A quoi servent-ils ? A rien ! Ceux qui contribuent à relever le continent sont les petites gens, les ouvriers, qui vont travailler dans les usines, ramasser nos poubelles... Deux milliards de dollars sont envoyés par la diaspora chaque année rien qu’au Sénégal ! Quand l’aide au développement représente 30 millions ! A la sueur de leur front ! Et les intellectuels n’y sont pour rien. Je les ai longtemps pratiqués et pardon de le dire, mais c’est un tas de merde. Les élites Africaines de la diaspora sont vendues aux occidentaux pour leurs seuls intérêts.
L’anti-élitisme est dans l’air du temps, ne pensez-vous pas qu’il est facile de pointer les lacunes des élites sans parler des progrès qu’elles apportent ?
Justement, celles-là n’apportent rien ! Je parle des pseudos élites d’aujourd’hui, rien à voir avec celle qui ont fait avancer notre société, celle des Lumières par exemple, qui prenait de vrais risques. Voltaire se réfugiait en Suisse après des écrits dérangeant en attendant que ça se tasse. Diderot et les encyclopédistes étaient régulièrement embastillés, car ils disaient des choses allant à l’encontre du système établi... Ils étaient libres et jouaient avec leur vie ! Rien à voir avec les parasites prédateurs d’aujourd’hui.
Les élites Africaines de la diaspora sont à la même image, vendues aux occidentaux pour leurs seuls intérêts. Par exemple, il n’y a pas un historien digne de ce nom. Alors que c’est dans les villages, dans les familles, chez les Bantous, que le père raconte comment l’arrière grand-oncle a vaincu l’empire du Mali à la bataille d’Accra... En Côte d’Ivoire, au Ghana, ça se raconte tout ça ! Mais pas chez nous.
Enfin, il y a la troisième composante que j’englobe dans ces "élites", ce sont les rapatriés occidentaux. Bien évidemment, ils ne se remettront jamais en cause et refusent de remettre en cause le colonialisme. J’explique très bien dans mon livre la façon dont, durant des années, on a remplacé à la tête des institutions Africaines les Africains par des occidentaux : grandes entreprises, administrations... Pensant qu’ils allaient mieux les gérer. En menant une politique totalement inadaptée, ils les ont menées à la ruine, et sont en partie responsables de cette image d’un continent à la dérive, faisant fuir les investisseurs.
Résultat : le plus grand manque de l’Afrique aujourd’hui, c’est les liquidités. C’est leurs erreurs que l’on tente actuellement de rattraper. Et quelle erreur d’avoir cru qu’un occidental allait mieux gérer qu’un Africain chez lui ! Quelle suffisance ! Quel racisme ! Tout ceci crée une vision biaisée dont on a beaucoup de mal à se défaire.
C’est ainsi que le Noir est devenu, par une série d’aberration et d’aveuglements, non pas issu de la grande civilisation Bantoue, mais l’esclave, l’inférieur... c’est incroyable.
Racisme social, néocolonialisme... votre livre s’attaque à des refoulés sociaux. Vous ne vous attendiez pas aux résistances ?
Dire à la France, aujourd’hui, qu’elle est raciste, c’est comme dire à un boxeur poids lourds qu’il est homosexuel : plus c’est vrai et évident - et refoulé - et plus vous avez de chance de vous en prendre une et finir K.O. ! (Rires) Vous avez tout à fait raison. Mais regardez mes notes à la fin du livre : tout y est, c’est inattaquable. Dans mon cas, au lieu de m’en mettre une, le boxeur a simplement tourné les talons et est reparti au vestiaire !
Pourquoi est-il si difficile de faire admettre que nous avons bel et bien cette vision fausse, et de la changer ?
Les fantasmes du Noir inférieur traînent car on est incapable de remonter à l’époque où le Noir dominait. Notre histoire, c’est environ 2500 ans de domination du Blanc sur le Noir, si je simplifie grossièrement. Or le Noir de type Bantou a dominé du début de l’humanité jusqu’à l’époque pré-Egyptienne, qui est bien plus longue que notre histoire car rien que l’Egypte, c’est 3000 ans d’histoire...
Propos recueillis par Jean FIAWOUMO
Suite à des problèmes de santé, Christian d’ALAYER dit ne plus avoir l’énergie physique pour trouver un éditeur pour son second livre, qu’il a mis pour le moment en ligne en accès libre : http://dalayer.oldiblog.com
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